Bank Al-Maghrib en partenariat avec la Société de Financement Internationale (SFI), membre du groupe de la Banque Mondiale, organise aujourd’hui à Casablanca une conférence sous le thème : Catalyser le marché secondaire des créances en souffrance au Maroc.
Intervenant lors de l’ouverture de cet atelier de travail, Abderrahim Bouazza, Directeur Général de Bank Al-Maghrib a souligné que cet événement est organisé pour présenter une réforme majeure pour le secteur bancaire et pour l’économie nationale. Il s’agit du projet de loi sur la création d’un marché secondaire des créances en souffrance au Maroc.
Cette réforme a été pilotée par un comité inter-institutionnel, sous l’égide du Secrétariat Général du Gouvernement comprenant des représentants du Ministère de l’Industrie et du Commerce, du Ministère de l’Économie et des Finances (DTFE et DGI), du Ministère de la Justice, du Ministère de l’Investissement, de la Convergence et de l’Évaluation des Politiques Publiques, du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire et de la Commission Nationale de la Protection des Données à Caractère Personnel.
Le projet de réforme, qui a été conduit selon une approche inclusive, a bénéficié de la forte contribution et implication des membres de ce comité interinstitutionnel et a fait l’objet d’une large concertation auprès du secteur bancaire, ce qui a permis d’ajuster le cadre cible aux réalités du marché et d’identifier les éventuels défis opérationnels.
Cette rencontre vise à mobiliser l’ensemble des parties concernées pour la réussite de ce projet. Elle également pour objectif de partager avec les participants les objectifs et les contours de la réforme, d’apprécier les progrès réalisés et d’examiner les perspectives qui permettront l’émergence d’un marché efficient et transparent où les établissements de crédit pourraient céder leurs créances en souffrance de manière sécurisée.
Selon Abderrahim Bouazza, l’encours des créances en souffrance des entreprises et des ménages, comptabilisées par les banques, a plus que doublé en 10 années pour dépasser les 98 milliards de dirhams, ce qui représente 8,6% du total des crédits des banques et presque 7% du PIB.
La hausse des créances bancaires impayées résulte de plusieurs facteurs notamment une conjoncture économique difficile, des difficultés sectorielles, le surendettement, les imprévus de la vie ou une mauvaise gestion.
L’encours de créances en souffrance peut s’aggraver dans le futur compte tenu des chocs économiques successifs de ces dernières années dont les impacts n’apparaissent pas encore dans les bilans bancaires et à cause des incertitudes de plus en plus grandes de l’environnement international.
En plus, cet encours de créances pourrait davantage s’aggraver en rapport avec la refonte de la circulaire portant sur la classification des créances et à leur couverture par les provisions.
D’un autre côté, les créances en souffrance (CS) restent dans les bilans bancaires pour des périodes plus ou moins longues, en raison des délais que nécessitent leur recouvrement amiable ou judiciaire. Il faut ajouter à cela les règles fiscales qui ne permettent pas de les sortir des bilans qu’après une période de 5 ans, et ce, après épuisement de toutes les voies de recours.
Les conséquences de cette problématique c’est que les créances en souffrance génèrent pour les banques des coûts importants liés à leur gestion, immobilisent des fonds propres requis par la réglementation sur la solvabilité et affectent leur liquidité. Sur ce dernier point, Abderrahim Bouazza rappelle que les besoins moyens de liquidité des banques oscillent en Moyenne autour de 120 milliards de dirhams. Ce déficit, qui est comblé par Bank Al-Maghrib, pourrait être alléger à l’avenir grâce au marché secondaire des créances en souffrance.
Ce sont là autant d’éléments ayant motivé la création d’un marché secondaire ou les créances en souffrance peuvent être cédées à des professionnels, une nouvelle classe d’investisseurs spécialisés dans l’achat des créances bancaires impayées avec une valorisation négociable avec les cédants.
Le projet de loi prévoit de lever les obstacles juridiques entravant la transférabilité directe des créances en souffrance : il supprime l’exigence du consentement du débiteur et simplifie les modalités de notification des avis de recouvrement de ces créances.
Cette cession permettrait ainsi aux établissements de crédit d’assainir leurs bilans, de libérer des fonds propres renforçant leur solvabilité et de disposer de nouvelles liquidités qui peuvent être réallouées à d’autres activités de financement.
La cession des créances en souffrance est un instrument complémentaire à la titrisation ; il a l’avantage de ne pas générer des coûts de structuration tout en allégeant les exigences règlementaires.
Pour la cession de leurs créances en souffrance, les banques doivent disposer au préalable de systèmes d’information permettant de fournir aux investisseurs des informations détaillées sur ces créances afin de leur permettre de mener leurs due diligence et de disposer d’une base fiable pour leur valorisation. Ce nouveau dispositif nécessite en plus un traitement fiscal adapté.
« Il est attendu de cette rencontre d’apprendre plus, des expériences ayant réussies, les défis rencontrés et les enseignements tirés afin, le cas échéant, d’ajuster notre approche et de réunir toutes les conditions requises pour la bonne mise en œuvre de la réforme. Je n’ai aucun doute sur l’engagement de l’ensemble des acteurs concernés pour la réussite de cette réforme majeure pour le renforcement de la résilience du secteur bancaire marocain. », conclut Abderrahim Bouazza.
Voici l”Allocution d’ouverture de Monsieur Abderrahim Bouazza, Directeur Général de Bank Al-Maghrib à l’occasion de la conférence.
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